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samedi 14 novembre 2015

Situation de l’enseignement des mathématiques (Sauvez les maths, 2002)

http://www.r-lecole.fr/collok/Situmath.htm


Alors, le titre est : “ situation de l’enseignement des mathématiques ” ? Eh bien, il est sinistré …

On voit maintenant une nette “ progression ”, si nous pouvons nous exprimer ainsi, dans les erreurs que l’on peut lire dans les copies. On dit que tous les élèves passent de classe en classe, force est de constater que leurs erreurs aussi. Les erreurs qui se trouvaient en 6e sont passées en 5e, en 4e, …, elles atteignent maintenant les 1es et Tales S, dans lesquelles un bon nombre d’élèves ne sait pas additionner ou simplifier des fractions si on ne leur dit pas de le faire, ni même reconnaître les multiples de … 2 …, du moins si on les prive de la sacro-sainte calculatrice, car avec ce fétiche indispensable ils … “ savent ” (la doyenne de l’inspection de lettres nous dira sans doute qu’il ne faut pas s’inquiéter puisqu’ils n’ont pas encore terminé leurs études…). Oui, en vérité je vous le dis, 2 divisé par 4, c’est pas facile.
L’évaluation de 2e est éloquente : par exemple quand on demande aux élèves de répondre à la question : “ le double de x est 8, déterminer ce nombre ”, ou quand, dans cette même évaluation, on demande de reconnaître les 4 opérations (distinguer les sommes et les produits dans une liste d’expressions) … C’est donc ce qu’il faut tester à l’entrée en 2e, selon nos chers dirigeants : bel aveu … Dans les établissements qui ne boycottent pas cette “ évaluation ” le taux de bonnes réponses est loin de 100%. Qu’a-t-on fait des élèves ?
Les sujets du baccalauréat sont éloquents, Science et Vie s’en est fait l’écho récemment.

Il serait inutile de répéter ici ce que nous disons depuis le début si nous étions seuls à le dire, l’important est que maintenant d’autres le disent, y compris des officiels.

Par exemple, dans des livres de math, l’un chez Bordas, l’autre chez Ellipses, peut-on lire :

Introduction de “ math pour les cracks ”, éditions Bordas :
Dans la mesure où les programmes sont allégés d'année en année, voire en cours d'année, les instructions officielles indiquant à longueur de pages “ On n'exigera pas... On se contentera d'exemples simples... On pourra admettre ce résultat... On se gardera de toute virtuosité.. ”, les “ initiés ” ne se laissent pas abuser. Un Bac ainsi obtenu, à l'économie, ferme pratiquement l'accès aux classes préparatoires ou contraint à l'abandon quelques jours après la rentrée. L'écart s'accroît entre ce qu'il suffit de savoir pour avoir son diplôme et ce qu'il faut maîtriser dès les premières semaines en classe préparatoire ou dans certaines filières universitaires exigeantes.
 (…) les auteurs ont voulu (…) aider les professeurs qui continuent, envers et contre tous, à être exigeants, dans l'intérêt même des élèves (…)
 (…) des exercices incontournables, (…), qui offrent des outils précieux que les professeurs dont la classe “ peut suivre ” ont traité, et qui, l'année suivante, feront partie de ce que “ tout le monde sait ”.

Livre “ s + up = sup ”, éditions Ellipses :
Avant-propos
Devant les difficultés croissantes qu’éprouvent les élèves sortant de terminale à assimiler les mathématiques de l’enseignement supérieur, il apparaît nécessaire de proposer aux futurs étudiants un ouvrage s’appuyant sur le programme de terminale leur permettant de s’habituer à la présentation plus abstraite des mathématiques de l’après BAC.
Le but [de] cet ouvrage est donc de permettre aux élèves motivés d’acquérir les connaissances mathématiques supplémentaires, et surtout l’état d’esprit et les méthodes qui leur permettront de suivre avec succès les études envisagées.
(Précisons enfin que l’on ne trouvera pas ici d’activités en couleurs, fractals irisés, et autres objets de présentation pseudo-scientifique, destinés à faire croire aux élèves que ce qu’ils apprennent est de bon niveau : un vrai problème se suffit à lui-même, et son étude amène, une fois l’effort accompli, des satisfactions intellectuelles qui n’ont rien à voir avec la production de figures multicolores.) (c’est donc un livre anti TPE, remarque personnelle)
Epilogue
Les remerciements spontanés d’un grand nombre de professeurs de l’enseignement supérieur vont aux collègues du secondaire qui, au risque de se faire mal voir, maintiennent dans leurs classes un enseignement exigeant et de qualité. Leur contribution à l’existence d’un haut niveau scientifique français méritait d’être ici évoquée.

Ainsi le lycée Camille Jullian, dans un document dont les feuilles portent en haut de page “ ministère de l’éducation nationale, académie de Bordeaux ”, précise-t-il que “ les élèves de la série L sont de plus en plus nombreux, depuis la mise en place de la dernière réforme du second cycle, à hésiter avant de s’engager dans la préparation de concours difficiles”.

Ainsi le président du CNP fait-il faire des dictées à sa fille ; vous savez bien, la dictée, cet exercice rétrograde et en voie d’interdiction car non formateur …

On pourrait résumer ainsi : l'éducation à deux vitesses : les “ vraies ” maths pour mes enfants et les enfants de ceux qui sont initiés à la réalité, et qui font donner des cours à leurs enfants, et les “ mathématiques citoyennes ”, i.e. les “ maths de contrebande ”, vidées de leur contenu, pour la majorité des autres.

Dans un article récemment paru dans le journal “ Le Monde ”, Danièle Sallenave écrit notamment :
(LE MONDE | 27.03.02 | 12h08 | analyse       Pour une école républicaine, par Danièle Sallenave : )
 (…) l'enseignement (…) des lettres et de l'histoire sont moribonds, (…) celui des mathématiques est si malmené que la recherche française en mathématiques est peut-être définitivement compromise.

Je vous renvoie au rapport Demailly, remis en juillet 2001 à Lang, qui dénonce l'état calamiteux de l'Enseignement Supérieur Scientifique, le niveau zéro auquel, faute de candidats valables, on recrute les futurs enseignants, ..., et qui rend coupable de cet état de fait les réductions incessantes des horaires, des contenus des programmes et de l'exigence vis-à-vis du travail et du niveau des élèves dans les Collèges et Lycées.

L’allégement des programmes de maths, et des exigences en général, implique de grosses difficultés dans les études supérieures. En conséquence, il y a catastrophe annoncée dans le supérieur, on aura de moins en moins de scientifiques en France, d’ailleurs la désaffection pour les études scientifiques est avérée.

On pourrait ajouter que Allègre, ayant décrété l'inutilité des Mathématiques puis de la Physique, avait décidé qu'il convenait de faire porter tout l'effort sur les Sciences du Vivant ; le résultat est patent : on a appris récemment qu'à la rentrée prochaine il n'y aura pratiquement plus (2 ?) de nouveaux étudiants en Chirurgie dans les CHU français. Bien entendu, les étudiants, “ encouragés ” depuis longtemps à des efforts a minima renâclent devant la difficulté et l'engagement que cette discipline demande.

Tout le monde, sauf peut-être certains pseudo-psycho-pédago-démagogues (PPPD), comprend très bien que le maintien d'un Enseignement Scientifique de haut niveau est et sera de plus en plus un moteur fondamental de la richesse nationale et on peut se demander si le nom de “ Charte pour le III-ème millénaire ” convient à une régression sans précédent, qualitativement et quantitativement, de l'Enseignement ; peut-être, nos PPPD, dans leur toute-puissance, s'imaginent-ils que l'évolution du Monde en général, des Sciences et des Techniques en particulier, suit à la lettre les programmes officiels des Lycées de France.

Nous devons avoir le temps d'enseigner, et nos élèves doivent avoir le temps d'assimiler. Est-ce le cas avec les heures dites de “ soutien ” ? Non. L’aide individualisée est reconnue inutile par un organisme officiel, voir un article du Monde de l’éducation, peu suspect de partager notre opinion, de janvier 2002, page 10 : une étude sur l’aide individualisée en montre l’inefficacité. Elles n'augmentent pas l'enveloppe horaire de ceux qui en bénéficient (puisqu’elles sont prises sur l’horaire des autres, nous appelons d’ailleurs à prendre la classe entière pendant l’heure dite d’“ aide individualisée ”, et à “ aider tout le monde ” !), d'autant que de plus en plus d'heures sont consacrées à des gadgets à la mode (Internet, TPE, ...) dont l'influence sur le niveau des élèves est évidemment nulle, faute d'une maîtrise suffisante des outils de base. Bref, ceux-ci abordent l'Enseignement Supérieur sans l'ombre du prérequis minimal qui pourrait leur permettre d'en tirer profit.

En conséquence, il faut ABROGER les TPE, l’ECJS, les itinéraires de découverte, et autres supercheries, qui font perdre à tous un temps précieux. Supprimer les heures de “ non-cours ” et restaurer les horaires disciplinaires.
Pour les TPE, on peut lire dans les brochures officielles, comme exemple : en plaçant sur “ un grand panneau des citations d'auteurs, plus ou moins longues [... 1 joliment recopiées ” (sic) et “ des images collées ” (réalisation donnée en exemple par la brochure “ rentrée 2001 ” du Bureau de la valorisation des innovations pédagogiques du Ministère de l'éducation nationale). Il est certain que ceci est du domaine de la recherche, et nous ne pouvons pas suivre. On nous objectera que c’est juste un exemple caricatural ? A partir du moment où de tels exemples sont donnés par ceux qui dirigent “ la maison ”, il y a une erreur de conception quelque part, et de “ responsables ”. Je laisse à d’autres le soin de donner des détails sur les “ itinéraires de découverte ” …

Il faut de plus arrêter de croire que l'ordinateur est l'avenir de l'homme. Le millénarisme niais de nos dirigeants leur fait croire que dès qu’il y a un ordinateur, le but est atteint. Les programmes semblent de plus en plus conçus en fonction des capacités des logiciels actuels, en général très faibles. On peut faire n’importe quoi, pourvu que ce soit avec des ordinateurs. (Et avec des logiciels très performants en orthographe, comme en témoigne le “ fameux ” “ objet(s) initiau(x) ”.) Dans une maquette de manuel pour les Tales S, c’est un tableur qui “ justifie ” l’existence d’une fonction (la fonction exponentielle), et l’écran sert de démonstration.

Que faire au quotidien ?
Nous appelons à maintenir un enseignement de qualité, ce qui a pour conséquence immédiate d’appliquer d’autres programmes que les “ programmes ” de la crétinisation. Les inspecteurs ne font peur qu’à ceux qui le veulent bien. S’ils sentent en face d’eux la détermination des professeurs sûrs de leur bon droit, ils ne chercheront pas l’affrontement. En effet, que peuvent-ils reprocher à un professeur qui fait plus et mieux que le programme officiel ? Or il suffit de travailler normalement pour être déjà hors programme.
Nous appelons au boycott des manuels scolaires basés sur des “ programmes ” indigents. Faisons savoir aux éditeurs que nous sommes attachés au livre et ne faisons pas partie des adorateurs du cd-rom, et que nous adopterons les manuels basés sur les anciens programmes s’ils les éditent toujours. Certes, ils ne maintiendront pas les anciennes éditions, allez-vous me répondre. C’est pourquoi on peut signaler par exemple que les collègues du lycée de Franconville ont édité leur propre livre, d’une toute autre tenue. Et que des collègues d’Herblay, entre autres, fonctionnent avec leurs propres polycopiés.

Un dernier encouragement pour ceux qui sont persuadés qu’ils resteront minoritaires : au lycée Clemenceau, à Nantes, une liste bâtie par des collègues sur la base du rejet des “ réformes ” qui détruisent l’enseignement et la culture recueille maintenant la majorité des voix (et des sièges) pour l’élection au C.A. (initiales de Conseil d’Administration, pas …). Ce dernier point n’est pas le plus important car un CA ne change pas une politique nationale, mais il symbolise une volonté collective de ne pas baisser les bras. Ils ont ainsi balayé ceux qui réclament l’application des “ réformes ”.
Voici un message d’un de leurs membres, Joël Gaubert, auteur par ailleurs du livre “ L'école républicaine : chronique d'une mort annoncée, 1989-1999 ” :
“ Joël Gaubert et la Liste Indépendante du lycée Clemenceau de Nantes remercient tous les organisateurs de cette initiative : il est, en effet, de plus en plus urgent de “ résister pour l'école ”. Nous attendons de cette journée le regroupement des forces, collectives et individuelles, qui travaillent en ce sens depuis des années, et la mise au point d'un manifeste qui puisse nous servir de programme d'action pour contrer plus efficacement le processus de destitution de l'école de la République, dont la reconstruction s'impose. ”

Collectif Sauvez les maths  sauverlesmath2@wanadoo.fr

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