André Davesne, Mamadou et Bineta apprennent à parler français.
Cours de langage à l'usage des écoles africaines. Classe de débutants et cours préparatoire. Livre du maître.
Ce cours de langage est (était) à suivre en parallèle des manuels de lecture pour le CP et le CE :
- Mamadou et Bineta apprennent à écrire - Syllabaire (CP 1)
- Les premières lectures de Mamadou et Bineta (CP 2)
- Mamadou et Bineta lisent couramment (CE)
Il suit d'ailleurs la même progression. Comparez la table des matières des ouvrages.
Dans la même collection, il y a aussi :
André Davesne, Mamadou et Bineta sont devenus grands (CM).
AVANT-PROPOS
« Je voudrais qu’il eût plutôt la
tête
bien faite que bien pleine »
(Montaigne).
En rédigeant, à l’usage des maîtres des écoles africaines,
ce petit livre de langage, nous nous sommes efforcé de ne jamais perdre de vue
les principes suivants :
1°
Faire simple. — Réduire le plus possible
la matière de chaque leçon ; choisir les mots indispensables et ceux-là
seulement ; bannir toute notion inaccessible, tout mot concret ne correspondant
pas à une réalité que l’élève puisse voir, palper, constater ne par parler de
redingote ou de fixe-chaussettes à l’enfant de la brousse vêtu d’un cache-sexe,
ni de justice et de solidarité à un gamin de 6 ans qui a tant à faire pour
apprendre à nommer les objets les plus communs, les actions les plus courantes.
2° Faire quelques
chose de vivant. — Ne pas laisser affalés
sur leur banc, somnolents ou ennuyés, les petits Noirs qui, plus encore que les
jeunes Français, ont besoin de gesticuler et de rire ; les faire aller et
venir, sauter et courir, agir de toutes manières ; en d’autres termes,
introduire à l’école de la vie et de la joie.
3° Faire appel à la
réflexion, à l’initiative des élèves. — Éviter
les répétitions machinales, les mornes rabâchages ; obliger l’enfant non
seulement à voir, mais à regarder, à observer et à comparer ; cultiver le
jugement aussi bien que la mémoire.
Tout cela n’est pas neuf, certes ; tout cela a été
recommandé cent fois par les manuels de pédagogie et par les instructions
officielles, ministérielles ou autres ; tout cela est connu, archi-connu. Mais,
comme dit Courteline, « le tout n’est pas de la connaître, c’est de la
pratiquer ». Tel maître, qui prône la pédagogie en action, laisse ses élèves
ânonner, avec une désespérante mollesse : « je casse le bâton, je pousse la
table, je saute sur le banc ». Tel autre, qui clame avec la véhémence de
Rousseau : « Des choses ! des choses ! », dessine au tableau noir l’épi de maïs
qu’il pourrait si facilement cueillir dans le champ voisin. Tel autre, enfin,
assuré d’être un fervent partisan de la simplicité, se croit obligé d’enseigner
gravement aux bambins de cinq ans que : « le mari de ma tante est le beau-frère
de mon père » (phrase entendue dans une classe de débutants. à propos
d’une leçon sur la famille !).
Nous ne saurions trop recommander aux maîtres de ne rien
ajouter à notre cours de langage. Beaucoup lui ont reproché d’être trop simple.
Nous déclarons nettement qu’il représente un maximum et non un minimum. Sa
simplicité n’est qu’apparente. En réalité, il exige de l’enfant un effort très
sérieux de réflexion, d’observation et de mémoire. Il permet d’arriver au bout
d’une seule année de scolarité, deux tout au plus pour les élèves peu doués, à
une connaissance du français déjà intéressante. Il est enfin une introduction
très suffisante au livre de lecture et de français du cours préparatoire 2e année
et du cours élémentaire.
Le maître qui veut enseigner trop de choses n’enseigne
rien. La mémoire des enfants, submergée, ne peut rien retenir. L’enseignement
devient dans ces conditions un perpétuel et vain recommencement.
Mieux vaut, comme disent judicieusement les Instructions
ministérielles de 1923, « moins apprendre, mais bien retenir ; mieux vaut moins
de souvenirs, mais des souvenirs complets et ordonnés ».
DAVESNE.
AVANT-PROPOS
DE LA NOUVELLE ÉDITION
Tenant compte des progrès accomplis et des résultats
obtenus dans l’enseignement du français depuis la parution des premiers Mamadou et Bineta, cette nouvelle édition
se distingue de la précédente par la place beaucoup plus importante qu’elle
réserve à la construction de la phrase française.
Dans notre ancien cours de langage; nous n’utilisions
guère que la phrase rudimentaire limitée aux moyens d’expression les plus
sommaires.
Dans le présent cours nous avons introduit l’étude d’un
assez grand nombre de « mots-outils » (prépositions, conjonctions) ainsi
que de pronoms, d’adjectifs déterminatifs, d’adverbes, qui permettent une
expression déjà assez précise et nuancée de la pensée.
Certes l’effort demandé aux élèves est, de ce fait,
nettement accru.
Il ne nous paraît pas, cependant, que la distinction
entre les deux divisions qui figure dans la plupart des leçons doive
nécessairement être respectée dans toutes les classes. C’est évidemment au
maître qu’il appartient de reconnaître ce qui, dans les notions réservées à la
première division, peut être étudié par les débutants. En particulier si ses
élèves savent déjà un peu parler français quand ils viennent pour la première
fois à l’école (c’est le cas de bon nombre de débutants dans les écoles des
villes), l’instituteur pourra leur enseigner la totalité des notions proposées
par chaque leçon.
Ce qui importe c’est que, par de très fréquentes
révisions, le maître s’assure que ce qu’il a enseigné a été compris et retenu,
et qu’il ne procède pas à des conquêtes nouvelles tant qu’il n’est pas certain
de tenir solidement le terrain précédemment conquis.
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